Bienveillance et/ou exigence : quelle posture managériale privilégier en situation de changement ?
Nous accompagnons et formons quotidiennement des entreprises, au travers de leur CODIR ou de leurs différentes lignes managériales, sur la conduite des changements à opérer et, très régulièrement, la question du positionnement du curseur entre bienveillance et exigence nous est posée par nos participants.
Alors, devons nous réellement trancher en faveur de l’une ou l’autre de ces 2 notions essentielles du management, que cela soit de façon générale ou aussi plus spécifiquement en situation de conduite du changement ?
Je ne le pense pas et avant de vous indiquer ma position et pour répondre à cette interrogation, problématique pour bon nombre de managers, il me semble pertinent de commencer par repréciser différents aspects à prendre en compte.
La bienveillance est définie* comme une « disposition d’esprit inclinant à la compréhension, l’indulgence envers autrui ».
L’exigence, quant à elle, est définie* comme « ce qui est commandé par les circonstances, les lois, la morale, la profession, etc. ; ce que quelqu'un réclame d'une autre personne, d'une institution... »
* selon le Larousse.
Si nous prenons ces définitions au pied de la lettre, nous pouvons effectivement penser que ces 2 notions s’opposent puisque d’un côté, il est question, d’une part, d’indulgence, donc potentiellement d’accepter une situation non satisfaisante, et d’autre part d’imposer que quelque chose soit absolument fait.
Si nous poussons cette logique avec une vision manichéenne, la bienveillance sans aucune exigence devient du laxisme et l’exigence sans bienveillance est de l’autoritarisme : nous arrivons effectivement à 2 postures radicalement opposées !
La réalité du quotidien d’un manager est nettement plus nuancée et les 2 dimensions sont alors absolument nécessaires : un management efficace et générateur de performance est à la fois bienveillant et exigeant !
Quels sont donc les facteurs qui rendent difficiles l’adoption d’une posture bienveillante ou exigeante pour certains managers, notamment en situation de changement ?
Voici quelques-uns de ces facteurs, cette liste n’est bien sûr, ni exhaustive, ni hiérarchisée :
La pression des résultats et l’urgence qui l’accompagne qui poussent certains managers à penser que l’adoption de nouvelles pratiques, postures ou outils doit être immédiate et parfaitement assimilée du « 1er coup »
La peur de perdre le contrôle qu’ils peuvent éprouver en laissant à leurs collaborateurs le temps nécessaire pour changer et accepter que leur progression ne sera ni binaire, ni linéaire mais exponentielle
Le sentiment de ne pas être légitime à demander des changements qui sont également à appliquer à soi-même et sur lesquels le manager n’est pas nécessairement exemplaire
La résistance « naturelle » au changement d’une majorité d’individus, issue du fonctionnement du cerveau et de ses mécanismes de neuro-plasticité qui fait que certains managers sont consciemment et plus souvent inconsciemment « solidaires » de leurs collaborateurs
L’environnement de « confiance » à construire qui doit nécessairement accompagner la bienveillance pour éviter qu’elle ne soit perçue comme du laxisme et l’exigence pour qu’elle soit perçue comme légitime.
Et d’autres encore, que vous pouvez proposer et partager en commentaires ?
Au-delà de la posture « naturelle », propre à chacun, qui va conduire à être plutôt bienveillant ou plutôt exigeant, chaque manager va devoir travailler à modifier le positionnement du curseur pour adopter un niveau optimal d’exigence bienveillante !
Pour cela, je vous propose d’utiliser la méthodologie suivante :
Donner à chaque collaborateur le sens du(es) changement(s) à opérer
Expliquer dans le détail les modalités pratiques du(es) changement(s) ainsi que les indicateurs traduisant la(eur) mise en œuvre effective
Former aux nouvelles habiletés ou compétences permettant d’opérer le(s) changement(s)
Accompagner/mentorer la mise en œuvre effective du changement en acceptant que chacun aille à un rythme qui lui est propre : profiter d’un éventuel constat d’absence de changement comme opportunité de progrès plutôt que comme une faute
Valoriser l’adoption des nouvelles pratiques et/ou les efforts consentis et féliciter les micros-succès et succès au fil des progrès réalisés
Accepter d’adapter son niveau d’exigence à la capacité et au potentiel de chacun
Constater l’adoption effective des nouvelles pratiques ainsi que l’acquisition des compétences associées
Fixer de nouveaux objectifs de changement, progressifs et adaptés à chaque collaborateur, et remettre en progrès jusqu’à l’atteinte du changement visé
Comme vous l’avez certainement compris, je pense donc que tout manager qui souhaite pratiquer un management performant, ne peut privilégier la bienveillance à l’exigence ou inversement, mais doit bien travailler sur la dimension qui lui est la moins naturelle pour manager avec un haut niveau de bienveillance associé à un haut niveau d’exigence.
Réussir cela, implique, entre autres, de créer les conditions de la confiance réciproque et s’assurer d’obtenir un feedback régulier et objectif sur la qualité de sa posture managériale : ce feed-back peut se faire par son manager, l’un de ses pairs ou encore tout tiers compétent !
Et vous, comment vous situez vous dans cet équilibre entre bienveillance et exigence ?
N’hésitez pas à partager, vos constats, expériences, ou toutes questions sur ce sujet.
Arnaud DUBOST et toute l’équipe Manegere Associés
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